Le deuil est une réalité, qui fait face à beaucoup d’idées reçues et de préjugés. Trop souvent on lui attribue une « durée type », des messages bienveillants mais au combien inadaptés, « ça va aller », « c’est bon maintenant, tu peux passer à autre chose »… Parlons ici de ce qu’est le deuil, pour mieux le comprendre.
Le deuil : comment le définir et le comprendre ?
La définition du deuil
Étymologiquement, le mot vient du latin dolus, la douleur. Il évoque une souffrance, une profonde tristesse, une grande peine.
On appelle deuil la perte, la rupture du lien émotionnel avec quelqu’un (ou quelque chose) qui était important pour nous.
C’est à la fois la douleur éprouvée suite à cette disparition, mais aussi la période et le processus de cicatrisation qui suivent cette perte. Le temps qui est nécessaire à l’acceptation de la séparation.
Un processus naturel dont l’intensité dépend du lien
Pour commencer, le deuil est un processus naturel, normal. Nous possédons d’incroyables ressources pour cicatriser la blessure intérieure de la perte, tout en préservant l’intégralité du psychisme. Il n’y a pas un deuil type, normé, calibré, répondant à un « délai de traitement ». Non, le deuil est unique pour chacun.
Enfin, il faut savoir que l’intensité du deuil est proportionnelle à la force de l’attachement avec ce que l’on perd. On peut, par exemple, être profondément peiné, affecté par la disparition d’un ami cher à notre cœur et, au contraire, peu touché par le décès d’un lointain cousin, que l’on connaissait à peine.
Normaliser le deuil face au tabou de la mort
Aujourd’hui, la mort est devenue tabou. En effet, on meurt loin du foyer, on a perdu le sens des rituels d’accompagnement comme la veillée funèbre à domicile. La mort fait peur, et avec elle, le deuil aussi.
Pourtant, comme la mort, il ne doit plus être tabou. Il doit être normalisé. Car il est essentiel, naturel et normal d’affronter la perte de quelqu’un ou de quelque chose qui nous était cher.
Chaque deuil est unique
D’une part, il s’agit d’une expérience universelle. Car chacun emprunte, à un moment de sa vie, le douloureux chemin du deuil. Et d’autre part c’est une expérience très personnelle : qui fait face à nos émotions, à notre histoire, à notre lien avec ce qui est perdu.
Pour conclure, on peut dire le deuil est une expérience universelle personnelle.
L’analyse et l’étude de ce processus
De Freud à Elisabeth Kübler-Ross
Sigmund Freud, psychanalyste, introduit en 1917 la notion de deuil, avec son ouvrage “Deuil et mélancolie”. Cet essai est sans doute l’un des plus cités de son auteur et c’est aujourd’hui l’un des textes de référence sur le deuil et la dépression.
C’est ensuite la psychiatre américaine, Elisabeth Kübler-Ross, qui a proposé une théorie sur les étapes du deuil dans son livre “Sur le chagrin et le deuil”. Spécialisée dans les soins palliatifs, elle a accompagné des milliers de personnes en fin de vie. Face au rejet, par notre société, de la mort, elle a toujours soutenu que celle-ci faisait partie de la vie.
Ne pas les confondre vécu dépressif et dépression
Cela dit, il ne faut pas confondre vécu dépressif et dépression. Le deuil conduit à un vécu dépressif. Cet état est naturel, normal et il fait partie du processus. Ce vécu dépressif est différent de la dépression. La dépression est vécue par un nombre limité de personnes pendant le deuil. Même si ces deux états ont de nombreux symptômes communs, ils ne doivent pas être confondus.
Dans le vécu dépressif, les vagues de désespoir et les temps de répit s’alternent. Avec le temps, la fréquence, l’intensité de ces vagues diminuent. Même si elles durent plusieurs mois, plusieurs années. Alors que dans la dépression, ce vécu douloureux ne trouve pas de fin. Il est continu, et s’aggrave avec le temps.
Les étapes
Bien que l’expérience du deuil soit unique, propre à chacun, on retrouve des étapes communes dans son déroulement.
Phase 1 : le choc, la sidération, le déni
Cette première phase est un mécanisme naturel de protection. Le temps de réaliser ce qui se passe, de faire face à l’inconcevable. C’est une confrontation avec des émotions si intenses, qu’elles s’en trouvent anesthésiées.
Or c’est dans cette phase que les obsèques interviennent. C’est pourquoi le rituel autour du départ, de l’adieu, à travers la veillée, la cérémonie… est si important. Il permet une prise de conscience de la perte physique.
Phase 2 : la fuite, la recherche
Cette phase peut entraîner l’incompréhension des proches. L’endeuillé va s’occuper l’esprit, fuir pour moins souffrir. Comme en se plongeant dans le travail. Il peut aussi chercher à préserver les liens : en touchant les vêtements du défunts, en sentant son parfum…
Phase 3 : la déstructuration
L’étape suivante, souvent la plus longue, est la déstructuration. Alors que l’on ne peut plus nier la mort, que l’on doit y faire face. La douleur, le sentiment de solitude, la perte des repères et le vécu dépressif s’accompagnent d’émotions très intenses.
Phase 4 : la restructuration
La restructuration est l’étape ultime. C’est une phase de reconstruction. Où l’endeuillée reprend goût à la vie. La cicatrice est là, mais moins douloureuse. L’endeuillé entame une nouvelle relation avec le défunt, une relation intérieure, à travers le souvenir.
Le deuil est dans une dynamique. Une fois que l’on prend conscience de la perte, alors ce processus de cicatrisation peut naturellement commencer. Se mettre en mouvement.
Processus et travail de deuil, des notions différentes
Le deuil se fait autant au niveau inconscient qu’au niveau conscient. Comme les deux faces d’une même pièce. L’une est le processus de deuil et l’autre, le travail de deuil.
- Le processus de deuil
C’est cette dynamique naturelle et inconsciente qui mobilise nos incroyables ressources pour cicatriser la blessure intérieure.
- Le travail de deuil
Le travail de deuil se fait à un niveau conscient. C’est une démarche volontaire, incontournable pour trouver l’apaisement, qui passe par 4 tâches :
- Reconnaître la réalité du décès : à travers les rituels, les démarches administratives…
- Vivre toutes les émotions du deuil
- Préserver la mémoire du défunt, créer ce nouveau lien avec lui : avec les souvenirs, les rituels pour honorer la mémoire…
- Développer une identité et un rapport nouveau au monde, ré-investir sa vie
Il ne faut pas oublier qu’il n’est jamais trop tard pour commémorer la mémoire d’un défunt. En effet les obsèques sont très rapides. Donc si il y a un besoin, un manque suite à des obsèques passées trop vite : on peut poser un rituel, un temps symbolique qui apaise la cicatrice.
Des ressources pour mieux comprendre ce que l’on traverse
Il existe des ressources pour mieux comprendre ce que l’on traverse et nos émotions…
Comme l’association Le Jour d’Après, qui propose un centre d’information, de ressources et d’accompagnement au deuil. Des professionnel(le)s et des bénévoles formé(e)s vous y accueillent au centre ville de Nancy.